nAutreville | Observation 9 | Mercredi 11.04.12

Le panneau est en panne, nous allons à la rencontre d’usagers du parc pour recueillir leurs commentaires à propos de nAutreville. Les remarques portent surtout sur le lieu d’implantation du panneau: en quoi le fait qu’il soit dans un kiosque au milieu d’un parc a une influence sur l’usage qui en est fait.
Période d’observation : 11h00 -12h30

Nous découvrons que le panneau est en panne. C’est probablement la raison pour laquelle il n’y a personne à côté et que le groupe de personnes faisant un cours de self-défense fait ses exercices maintenant sur le kiosque. Nous avons vu ce groupe s’entraîner à chacune de nos observations, mais avant ils étaient dans les allées à côté du kiosque et non dans le kiosque.


Nous décidons alors de rapprocher les personnes ayant l’habitude de venir au square pour leur demander des retours sur nAutreville.

 Un groupe de vieux messieurs, composé de trois Chinois et deux Portugais, disent venir au parc tous les jours mais n’avoir jamais utilisé le panneau. L’un s’exclame : « C’est une carte de la ville ». Nous leurs expliquons le fonctionnement et les possibilités de découverte du quartier qu’offre nAutreville. Ils nous répondent qu’ils n’ont pas besoin de l’utiliser étant donné qu’ils connaissent déjà le quartier et qu’en plus ils ne savent pas se servir des ordinateurs. Ils ajoutent une remarque sur l’emplacement. A leur avis le kiosque est un lieu de jeu et il faudra donc choisir un autre emplacement comme l’entrée de la Mairie ou la rue : « un lieu où passent des gens qui ont besoin de voir une carte ! ».

Nous rapprochons ensuite trois mamans dans la zone de jeu. Elles disent n’avoir jamais prêté attention au panneau, elles ont vu parfois des enfants se rapprocher, mais elles ne peuvent pas s’éloigner de la zone de jeu car elles doivent surveiller leurs enfants.

Un monsieur sur un banc, dit avoir l’habitude de venir au square mais de s’asseoir de l’autre côté du parc, c’est la première fois qu’il prend place sur un banc face au kiosque. Il semble gêné de nous dire qu’il n’avait pas remarqué le panneau et il nous demande à quoi il sert. Suite à notre explication il nous fait une remarque sur l’emplacement : « Mais ce n’est pas le bon lieu. Les gens passent dans les allées, mais ils ne vont pas dans le kiosque ».

11h30

Le kiosque est toujours occupé par les personnes du cours de self-défense. Nous approchons un autre monsieur assis sur un banc. Il nous dit ne pas avoir utilisé le panneau et il rajoute : « le kiosque c’est une zone de combat, il y a toujours le cours de self-défense, alors je ne m’y approche pas ! ».

 Midi

Les personnes du cours de self-défense ont fini leur entraînement. Nous allons les voir. Ils font parti d’un club et ils ont l’habitude de s’entraîner au square du Temple depuis longtemps. D’ailleurs ils nous disent avoir toujours occupé le kiosque, car ça leur sert de périmètre d’action. Ils font du Krav Maga, un sport de combat et self-défense israélien.  Ils ont changé leurs habitudes avec l’installation du panneau et ils ont alors occupé l’allée derrière le kiosque : « Depuis l’installation il y a toujours eu plein d’enfants autour, il était impossible d’accéder au kiosque ». Mais, étant donné que le panneau est en panne depuis quelques jours et que personne ne s’y approche, ils ont repris leur habitude et leur cours se déroule donc dans le kiosque.

Le professeur du cours dit avoir utilisé le panneau le jour où il a été installé. Il trouve que c’est un objet intéressant et intriguant grâce à son côté interactif et qu’il attire énormément les enfants. Il dit avoir utilisé le panneau pour vérifier s’il y avait référencé son restaurant qui se trouve à République. Il ne l’a pas trouvé et il pense que le contenu n’est pas assez détaillé pour les personnes qui connaissent déjà le quartier. Il aurait aimé, par exemple, y trouver des magasins qui vendent des fournitures de sport. En ce qui concerne l’utilisation, il dit avoir tout de suite compris qu’il tournait et que ce mouvement était lié à la géolocalisation. À son avis c’est très utile pour les passants qui cherchent un lieu mais son fonctionnement n’est pas clair. Il suggère de mettre un slogan sur le panneau du genre : «Cherchez la boulangerie du quartier ! » afin que les gens comprennent à quoi il sert. Il ne pense pas que le kiosque est le bon emplacement, car c’est le terrain de jeu des enfants; il nous dit enfin apprécier le fait que cet objet soit réalisé avec le principe de la réalité augmentée : « la première fois que j’ai vu la réalité augmentée c’était sur un iPhone et ça m’a beaucoup plu ! ».

Ce contenu a été publié dans 01_OBSERVATIONS DE TERRAIN, nAutreville (75003) par Francesca Cozzolino. Mettez-le en favori avec son permalien.

A propos Francesca Cozzolino

Docteur en anthropologie sociale et membre de l’équipe anthropologie de l’écriture de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, je suis en charge du projet de recherche: « Le défi d’un design des situations. Les enjeux des panneaux d’information urbaine. Le cas du projet nAutreville ». Ceci est développé dans le cadre d’un contrat post-doctorale, soutenu par le Programme Emergences de la ville de Paris. Dans l'intention de confronter naUtreville à d’autres objets produits en réponse à l’appel de la Mairie de Paris “mobilier urbain intelligent”, une démarche permettant des observations collectives a été mise en place. C’est ainsi qui a été crée le cours «Anthropologie et design. Observation, critique et prospection ». Responsable du cours, j’assure l’encadrement des observations et l’initiation des étudiants à l’enquête en science sociale en les accompagnant dans les différentes phases du projet (mise en place de la problématique, retours d’ordre méthodologiques, références bibliographiques, analyse des données, rédaction de compte rendu, formulation de propositions de design).

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

*