Figure du Pro-Am 2.0

Grâce à l’informatique et au web participatif, des amateurs, passionnés et touche-à-tout, apparaissent, dans nos sociétés contemporaines.

Ils ne sont ni novices, ni professionnels. Mais, par la démocratisation des compétences qu’ils ont enclenché, ils contre-balancent l’élitisme à l’oeuvre dans le monde des politiques et des experts professionnels : ils produisent des connaissances, diffusent de l’information, créent des oeuvres et militent, à travers des organisations au périmètre ouvert, dans lesquelles les autorités décidantes sont décentralisées. Ils définissent une culture numérique.

Cette démocratisation politique et scolaire est traitée par Dominique Cardon dans La démocratie internet : promesses et limites et par Patrice Flichy dans Le sacre de l’amateur : sociologie des passions ordinaires à l’ère numérique, publiés en 2010. Elle trouve son origine dans la création du Free Software Foundation (FSF) en 1985 par Richard Stallman, ainsi qu’un affaiblissement symbolique de la coupure entre concepteur et usager.

Cette révolution, qui permet de transformer les autodidactes et les ignorants de jadis en experts patentés,  soulève des craintes : celles que l’amateur médiocre se substitue au professionnel talentueux. Mais, pas plus que la nouvelle économie numérique n’a tué la vieille économie, les amateurs ne vont remplacer les experts.

La nouvelle démocratisation repose sur des individus qui, grâce à leur niveau d’éducation et aux nouveaux outils informatiques, peuvent acquérir des compétences fondamentales dans le cadre de leurs loisirs. Ainsi, ces compétences permettent de dialoguer avec les experts, voire de les contredire, en développant des contre-expertises.

Ainsi, le pro-am (contraction de professionnel-amateur) est le citoyen, profane, ordinaire et ignorant à la base d’un domaine. Il développe une ‘’expertise ordinaire’’, c’est-à-dire une expertise acquise par l’expérience, qui lui permet de réaliser pendant son temps libre, des activités qu’il aime et qu’il a choisies. Son activité est souvent non marchande (proche du bénévolat). Elle se développe dans trois domaines : les arts, la chose publique, la connaissance. Grâce à l’Internet, le pro-am s’inscrit dans des communautés virtuelles qui permettent de partager les mêmes goûts. Ainsi, il  peut non seulement acquérir des compétences, mais aussi les mettre en oeuvre sous différentes formes. Il entremêle les positions du producteur et du discoureur.

Ainsi, comme l’indique Dominique Cardon dans son ouvrage, en décloisonnant le débat et en l’ouvrant à de nouveaux participants, Internet renouvelle les possibilités de critique et d’action. Surtout, le web constitue à l’échelle planétaire un laboratoire d’expériences démocratiques : auto-organisation des citoyens, délibération élargie à de nouveaux publics, mise en place de collectifs transnationaux, socialisation du savoir, etc.

Internet ne permet pas seulement de communiquer davantage ; Parce qu’il intègre moins d’exigences sociales et culturelles, et permet même dans certains cas, une participation presse-bouton (like, partage sur les réseaux sociaux), il élargit formidablement l’espace public et transforme la nature même de la démocratie.

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