Pour lutter contre l’enclavement territorial, certaines régions françaises ont choisi le numérique. On les appelle les « territoires en réseau ». Selon Pierre Musso, « il est devenu banal de constater cette omniprésence et omnipotence du Réseau, pour en souligner tantôt les bénéfices, tantôt les menaces. », Critique des réseaux, p. 5.
A l’heure des TIC, le réseau est invisible et pourtant il est bien réel et partie prenante des flux que nous générons. Aujourd’hui, les territoires numériques disposent d’une couverture internet haut-débit, d’un tissu d’entreprises important à l’échelle locale et pouvant être regroupés sous la forme de cluster tels que Auvergne TIC.
QU’EST-CE-QUE LE RÉSEAU ?
COMMENT IL ASSOIT LE POUVOIR DES TERRITOIRES NUMÉRIQUES ?
Selon Pierre Musso, le réseau serait au sein d’un clivage Nature/Culture. En effet, « l’aspect artificiel de la figure du réseau proviendrai du fait qu’il est tout d’abord question d’une technique : d’abord artisanale, associée au tissage, puis de techniques de plus en plus mécanisées et industrialisées », tels les « réseaux technologiques de communication cybernétiques et les autoroutes de l’information, en passant pas les réseaux de communication industriels développés au XIXème siècle, comme le chemin de fer. L’aspect naturel que Pierre Musso met également en avant, résiderait dans le fait que le réseau est associé et appliqué conceptuellement à un organisme biologique (le plus souvent le corps humain). », in Critique des réseaux, Pierre Musso (PUF 2003) ou la mort annoncée de la figure du réseau, Zetlaoui Tiphaine, In: Quaderni. N. 52, Automne 2003. Secret et pouvoir : les faux-semblants de la transparence. pp. 123-128.
Difficile à appréhender, le réseau dit « naturel » serait lié à la représentation du corps humain. Quant au réseau dit « artificiel », il serait une technique. « Ainsi, le réseau aurait permis de penser le futur social, mais aussi de se représenter l’organisme humain. », in Critique des réseaux, Pierre Musso (PUF 2003) ou la mort annoncée de la figure du réseau, Zetlaoui Tiphaine, In: Quaderni. N. 52, Automne 2003. Secret et pouvoir : les faux-semblants de la transparence. pp. 123-128.
Autrement dit, nous allons nous intéresser au réseau « artificiel », lié à la technique, comme moyen. Le réseau va rendre possible la mise en place « des moyens numériques au service des projets des territoires, des politiques publiques, des initiatives privées, des besoins des habitants. (…) Il a vocation à être intégré aux démarches structurantes et à soutenir les dynamiques de projets des territoires. », in INTERNET ACTU, Territoires : le développement numérique à l’heure de la maîtrise collective, Jacques-François Marchandise, 2005.
Ici, le réseau est le vecteur permettant de connecter différents acteurs de la vie économique, sociale et politique. Il est au sein des enjeux de pouvoirs du territoire qu’il structure. En effet, on note que les échanges numériques utilisés entre professionnels, ou entre particuliers, ont aussi fait leur apparition dans les administrations. Le réseau va alors permettre la création et la diffusion de multiples services, qu’ils soient à l’initiative des administrations elle-même (déclaration de l’impôt en ligne) ou de jeunes entrepreneurs (Babelio, covoiturage.fr …).
La déclaration de l’impôt en ligne, mise en place par les administrations, a un double but. Certes, elle facilite les démarches de l’usager, mais surtout, elle est un gain de temps précieux, et une économie de moyens : moins de papier, moins de personnel, et donc une réduction des coûts. Dans ce cas précis, l’administration a su se saisir de l’un des possibles numériques et en faire la source d’un autre type de pouvoir, dans la continuité de celui qu’elle possédait auparavant et servant aussi ses propres intérêts.
Ex-Libris, quant à lui, fonctionne de manière très différente. C’est un projet de diplôme réalisé à l’Ensci par Adrien DEMAY. Il démontre comment, à l’échelle locale, on peut grâce au réseau, mettre des livres en ligne, et ainsi obtenir une bibliothèque connectée et partagée. C‘est « un ensemble d’outils et de dispositifs symbiotiques visant à mettre en valeur les ressources bibliographiques locales, faciliter l’expérience de la lecture et encourager l’échange de livres entre habitants. », in Ex-libris : le livre entre bien commun et propriété, Adrien DEMAY. La plateforme Ex-Libris a donc de multiples atouts pour les usagers et pour l’administration même. Elle propose une réponse à un manque d’infrastructures liées au livre en milieu rural que les territoires ne peuvent combler. Ex-Libris vient alors créer une alternative indépendante, beaucoup plus souple pour les usagers. On assiste alors à la naissance d’un nouveau pouvoir dit « numérique », qui est le résultat de l’appropriation de l’outil numérique par tous. Ce projet a été élaboré avec le soutien de Babelio, un site de livres en ligne existant.
Le pouvoir des territoires numériques est un pouvoir à l’image de la figure du réseau, c’est à dire un pouvoir partagé. Les différents pouvoirs en présences sont mieux répartis, et cela entre les différents acteurs. Malgré les tensions, ils se complètent parfois, pour offrir un meilleur service, plus diffus, plus accessible et moins rigide.